Qu'est-ce que l'être humain? Qu'est-ce qui le caractérise essentiellement et fondamentalement? Notre étude se propose de répondre à cette grande question, en examinant ce que dit Georges Bataille sur la naissance de l'art dans son livre intitulé Lascaux ou la naissance de l'art(1955). Dans ce livre qui constitue l'un de ses deux principaux ouvrages sur l'art (l'autre est bien sûr Manet(1955)), le philosophe de la transgression se penche sur l'art pariétal de la caverne de Lascaux, découverte en 1940, et qui abrite un ensemble de peintures et de gravures le plus riche et le mieux conservé des cavernes préhistoriques. S'appuyant sur l'universalité des jugements élémentaires et considérant avec prudence la réaction fondamentale des hommes, Bataille a recours aux renseignements historiques et ethnographiques disponibles pour interroger dans son ensemble la question du passage de l'animal à l'homme. Les propos de Bataille, développés àtravers les figurations qui datent les premiers temps ou la première partie du Paléolithique supérieur, c'est-à-dire avant trente mille ans, peuvent être résumés en ceci : la naissance de l'art, assumée par l'Homo sapiens,coïncide avec la naissance de l'humanité qui, étant notre semblable, mérite pleinement son nom. Bien entendu, Bataille admet que l'homme se dégagea de l'animalité par la fabrication des outils et le travail qui lui donnent à la fois la raison et la vie améliorée, tout en instituant les interdits. Mais il estime que cela ne suffit pas à ce que naisse la véritable hamanité. C'est avec l'activité artistique, qui présuppose le dépassement des interdits et la transgression, que l'homme accède d'une part à l'émancipation du joug du calcul et de l'utilité qu'impose le monde du travail et de la raison en contrepartie de la vie matérielle aisée et de sa conservation, d'autre part àla liberté et à la souveraineté. Ces possibles qu'offre la transgression, et qui se concrétisent en activité artistique, nous semble impliquer deux mouvements : l'un est le retour qui consiste à se ressourcer à son origine qui est la nature, sinon le monde de l'animalité qu'il a quitté ; l'autre est l'ascension que l'on constate dans le geste de l'homme qui s'élève au-dessus de lui, transgressant et dépassant les interdits qui protègent sa condition de vie. Il est à conclure de tous ces faits que l'homme apparaît comme un être qui se dépasse pour se débarrasser du monde de calcul et d'efficacité prosaïque, et pour aller, sans pouvoir être contenté de la vie profane fournie par son entreprise raisonnée, vers la liberté et la souveraineté qui s'approchent infiniment du plan impossible du sacré. Et làest une réponse que notre étude déduit, en considérant le travail de Bataille sur le miracle de Lascaux.