Pierre Loti, comme aide de camp du vice-amiral Pottier, est à bord du cuirassé à destination de la Chine pour ‘aider' l'impératrice Tseu-Hi à écraser la révolte des Boxsers(1900); à cette occasion, il fait escale au Japon. L'oeuvre qu'il représente sous forme de journal, basée sur des aventures avec des femmes, des paysages et des moeurs japonais lors du séjour est La troisième jeunesse de Madame Prune. Alors Loti séjourne aussi à Séoul pour 9 jours; l'histoire de ce séjour y est insérée.
D'autre part, Paul Claudel, après plus de 14 ans de séjour en diplomate en Chine, s'installe à Prague en 1909; la conférence qu'il y donne concernant la Chine est “Les superstitions chinoises”; dans cette conférence il cite une tradition coréenne en exemple; plus tard, pendant le service au Japon comme ambassadeur Claudel rend visite en Corée(1924), et il ‘esquisse' la Corée à son Journal.
Et notre étude a pour objet de faire émerger des images de la Corée ou des Coréens vues par Loti et Claudel, basées sur leurs oeuvres ci-dessus: il serait intéressant et significatif d'examiner les regards de deux écrivains majeurs(un militaire et un diplomate) qui étaient témoins des rivalités d'intérêts, d'autant plus qu'alors la Corée était un lieu des rivalités d'intérêts entre des grandes puissances impérialistes.
D'abord, la Corée pour Loti est un pays ‘étrange’; pour lui les Coréens sont très étranges; ils sont insupportablement ‘drôles', ‘bizarres', ‘saugrenus' et ‘extravagants'. Ainsi, “en Corée tout est saugrenu, impossible à prévoir." Et Loti utilise les mots ci-dessus(drôle, bizarre, saugrenu, extravagant, étrange, etc) pour montrer ‘l'étrangeté' qui est à l'origine de l'exotisme. Et l'utilisation de ces mots pourrait être dangereuse; ilse peuvent contenir le sentiment d'antipathie et de mépris à l'égard de la culture des autres. En réalité, à la lumière des métaphores animales dont il se sert souvent ces mots révèlent son regard infâme, c'est-à-dire son regard raciste à l'égard des Coréens en rappelant l'aideur des animaux métaphorisés; la pratique des métaphores animales même est une action de les baisser en êtres inférieurs au niveau de l'animal, en accentuant l'animalité.
Ensuite, la Corée pour Loti est “un vieil empire croulant". Ainsi, pour lui la Corée est toute ‘grise': ‘les grisailles de Séoul’ sont condensées par la tristesse et l'immobilité’. Loti, qui a utilisé beaucoup de mots rappelant l'étrangeté pour montrer ‘l'étrange Corée' désormais mobilise tous les mots qui peuvent rappeler le vieil empire croulant; pour Loti, cette étrange Corée qui est devenue un lieu des rivalités d'intérêts entre des grandes puissances impérialistes est en train de tomber entre leurs mains.
Pour Claudel, la Chine est un pays de superstitions; parmi elles, il y a le Feng-shui qui est “la science des directions et des courants" il montre bien “l'idée que les Chinois se font de la nature”, c'est-à-dire l'affinité naturelle; pour Claudel, en Chine la nature et l'homme vivent en si bon accord; les Chinois ne causent pas un dommage à la nature; au contraire, ils souhaitent la coexistence pacifique avec la nature. Cependant, ce qui importe, c'est que les Coréens également attachent de l'importance au Feng-shi; en effet, en citant une tradition coéenne en exemple du Feng-shi Claudel montre indirectement sa pensée que les Coréens accordent de l'importance au Feng-shi. Pour Claudel qui a horreur de la civilisation occidentale, le Feng-shui ainsi contribue beaucoup à la vie des peuples extrême-orientaux qui attachent de l'importance à l'harmonie entre l'homme et la nature; cela est au contraire des peuples occidentaux qui détruisent la nature par la séparation entre le moi et la nature. Et la Corée, un des pays de la région extrême-orientale, accorde également de l'importance au Feng-shi comme la Chine; c'est pourquoi elle existent à l'antipode de la civilisation occidentale; et pour Claudel la Corée est un pays “du matin frais" qui n'est pas pollué par la civilisation matérielle de l'occident basée sur l'avidité, et celui où son peuple vit en si bon accord avec la nature.